Glyphosate: un enjeu électoral lors de la prochaine élection provinciale – Acadie Nouvelle – septembre 14 2017

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l’article par David Caron
le photo courtoisie de David Caron

Une quarantaine de personnes ont assisté à la rencontre à Doaktown, situé entre Miramichi et Fredericton. – Acadie Nouvelle: David Caron

Le mouvement d’opposition d’herbicides à base de glyphosate continue de gagner des adeptes au Nouveau-Brunswick et les militants du groupe Stop Spraying New Brunswick ont pleinement l’intention de continuer de marteler leur message au cours des prochains mois. La question pourrait devenir un enjeu important lors de la prochaine élection provinciale en 2018, croient-ils.

Les prochaines semaines s’annoncent très occupées pour Caroline Lubbe-D’Arcy, militante de Stop Spraying New Brunswick. Le jour, la femme de Fredericton exerce sa profession de dentiste. Le soir, elle prend la parole dans plusieurs petites communautés de la province et participe à des événements qui ont pour objectif de souligner les effets nocifs du glyphosate, un produit déclaré cancérigène probable par l’Organisation mondiale de la santé en 2015.

Au départ, elle se contentait de son rôle d’administratrice de la page Facebook du groupe qui comptait quelque 2500 membres. En avril 2016, les choses ont changé. Le réseau CBC a obtenu des documents du ministère des Ressources naturelles démontrant que le nombre de chevreuils dans la province est passé de 270 532 en 1985 à 74 338 en 2014.

Le ministère attribuait le déclin à la quantité de neige au sol durant l’hiver et à la hausse du nombre de coyotes. Plusieurs croient cependant que l’activité humaine est en cause.

«Du jour au lendemain, le nombre de membres a explosé. C’est probablement à ce moment que je me suis impliqué de façon active. Plusieurs sont inquiets de l’impact de l’arrosage sur la faune», a dit Mme Lubbe-D’Arcy lors d’une entrevue avec l’Acadie Nouvelle qui a précédé un événement organisé par des opposants au glyphosate mardi soir, à Doaktown, entre Miramichi et Fredericton. Une quarantaine de personnes étaient présentes.

Caroline Lubbe-D’Arcy prévoit de participer à plusieurs autres activités semblables au cours des prochaines semaines.

«On n’est pas en train de s’auto-inviter à ces activités, ce sont des gens des communautés qui nous demandent d’y être. Cette semaine, je vais aussi être à Hanwell. Un membre de Stop Spraying m’a demandé de faire une présentation devant le conseil municipal. Je suis occupée ces temps-ci parce que je travaille à temps plein, mais je suis heureuse de constater que les gens sont en train de prendre le taureau par les cornes et d’agir.»

Kevin Shaw, originaire de Juniper, n’a pas été élevé dans l’abondance, sa famille vivait de la terre.

«Nous n’avions pas beaucoup d’argent, mais mes parents travaillaient fort. On cueillait des têtes de violon et des légumes dans le jardin. On pêchait de la truite et du saumon. À l’automne, on allait cueillir des baies dans le bois et on les congelait. On chassait la perdrix, l’orignal et le chevreuil», raconte l’homme âgé de 57 ans.

Aujourd’hui, il n’a plus l’impression qu’il pourra transmettre son mode de vie à ses petits enfants. Il a joint le groupe Miramichi Headwaters Salmon Federation au milieu des années 1980 pour préserver la nature. D’après lui, les herbicides répandus dans le forêts nuisent grandement à la faune et à la flore.

«Il ne reste plus rien. Je ne vais plus cueillir les petits fruits, parce qu’on nous conseille de ne pas les manger. Il est encore possible d’obtenir un permis pour chasser le chevreuil, mais il n’en reste plus beaucoup. Avant, à Juniper les chasseurs tuaient environ 200 bêtes par saison. Maintenant, on est chanceux si on en voit une douzaine.»

Rod Cumberland, ancien biologiste au ministère des Ressources naturelles et aujourd’hui enseignant au Collège de technologie forestière des Maritimes, figure parmi ceux qui croient que l’épandage d’herbicide joue un rôle central dans le déclin des populations de chevreuils.

Le glyphosate est utilisé pour enrayer la croissance d’arbres feuillus, et ce, afin de favoriser la croissance de conifères.

«Les orignaux et les chevreuils se nourrissent d’arbres feuillus et ce sont ces arbres que le glyphosate vise. Je ne vois pas comment ça pourrait être bon pour la nature. Je ne suis pas en train de dire que c’est la cause du déclin, mais c’est un facteur majeur. »

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Un enjeu électoral?

Plusieurs militants interrogés mardi soir à Doaktown croient que l’arrosage d’herbicides deviendra un enjeu important lors de la prochaine élection provinciale en 2018.

C’est l’avis de Ken Walker, membre du conseil provincial du Parti vert du Nouveau-Brunswick. Selon lui, les questions environnementales prennent de plus en plus d’importance dans le débat public.

«C’est déjà un enjeu électoral selon moi, le seul problème c’est qu’il y a deux formations politiques, les libéraux et les progressistes-conservateurs, qui ne veulent pas en parler. Nous allons en parler, la question est de savoir si l’électorat sera à l’écoute.»

Caroline Lubbe-D’Arcy croit que cette question va continuer à gagner en importance dans la province. Elle cite en exemple une pétition qui demande au gouvernement provincial d’interdire l’arrosage sur les forêts publiques. Quelque 30 000 signatures auraient déjà été récoltées, affirme-t-elle.

«Je pense que ça va être un enjeu lors de la prochaine élection, on voit que les partis font des pieds et des mains pour se positionner sur la question. De notre côté, on est toujours en train de commander de nouvelles pancartes, c’est un sujet brûlant d’actualité. Nos membres sont invités à prendre la parole un peu partout, ça n’arrête pas.»

Outre le Parti vert du Nouveau-Brunswick, l’Alliance des gens du Nouveau-Brunswick, un parti qui a récolté seulement 2,14% des votes lors de l’élection de 2014, s’est aussi positionnée contre l’utilisation du glyphosate.
Jake Stewart, député progressiste-conservateur dans Miramichi-Sud-Ouest-Baie-du-Vin (qui comprend Doaktown), s’est aussi prononcé en faveur d’une interdiction des herbicides à quelques reprises dans le passé. Il n’a cependant pas répondu à notre demande d’entrevue.