Financement politique: le gouvernement Gallant mise sur le statut quo. Acadie Nouvelle – 17 février 2017

Par MATHIEU ROY-COMEAU


«Le fait que ça se passe comme ça depuis des années, autant sous les conservateurs que chez les libéraux, semble démontrer que le secteur privé estime que ça en vaut la peine quand ils donnent au parti au pouvoir», a dénoncé M. Coon.

Les libéraux préfèrent laisser à la commission sur la réforme électorale le soin de se prononcer sur la participation des entreprises au financement des partis politiques sans toutefois cacher leur parti pris pour le statu quo.

Les députés libéraux ont défait cette semaine le projet de loi 20 du Parti vert pour mettre fin aux dons des entreprises et des syndicats aux partis politiques.

Les députés du gouvernement ont expliqué leur choix en disant préférer attendre les recommandations de la commission sur la réforme électorale qui doit soumettre son rapport au plus tard le 1er mars avant de faire des changements au système.

Durant le débat sur la deuxième lecture du projet de loi, les libéraux n’ont cependant pas dissimulé leur penchant pour l’état actuel des choses qui permet aux entreprises et aux syndicats de donner jusqu’à 6000$ par année à chaque parti.

Les règlements en place permettent déjà «de maintenir la confiance du public dans le système électoral et de renforcer les principes de transparence, d’égalité et de participation qui sont les fondements d’un gouvernement démocratique», a insisté le leader parlementaire du gouvernement, le ministre Rick Doucet.

«L’objectif de la loi n’est pas d’empêcher ou d’interférer dans la libre circulation des idées et de l’information», a-t-il dit.

Le leader du gouvernement a spécialement insisté dans son discours sur l’importance de laisser les syndicats faire des contributions aux partis politiques.

«Les syndicats ne sont pas des entreprises. Ce sont des organisations qui représentent de bons travailleurs et travailleuses.»

«L’activité politique des syndicats est une avenue très importante pour permettre aux travailleurs d’exercer leur droit démocratique», a souligné Rick Doucet.

Le chef du Parti vert, David Coon, estime qu’il faut éliminer les dons politiques des sociétés pour mettre fin à la notion selon laquelle il faut donner au parti au pouvoir pour bénéficier des largesses du gouvernement.

Selon ses observations, les entreprises donnent toujours davantage au parti du gouvernement, ce qui prouve qu’elles contribuent plutôt par opportunisme que par conviction politique.

«Le fait que ça se passe comme ça depuis des années, autant sous les conservateurs que chez les libéraux, semble démontrer que le secteur privé estime que ça en vaut la peine quand ils donnent au parti au pouvoir», a dénoncé M. Coon.

Les députés du Parti progressiste-conservateur se sont abstenus de participer au débat et n’ont pas voté durant la deuxième lecture, ce que n’a pas manqué de souligner le ministre des Transports et de l’Infrastructure, Bill Fraser.

«Peut-être qu’ils n’ont rien à dire, ou peut-être qu’ils ne veulent pas que les gens du Nouveau-Brunswick sachent ce qu’ils pensent de ce projet de loi et ce que sont leurs intentions.»

En mêlée de presse vendredi, le député progressiste-conservateur Bruce Fitch a refusé de divulguer l’opinion de son parti sur la proposition de David Coon.

M. Fitch a expliqué que les progressistes-conservateurs avaient choisi de ne pas participer aux débats «pour laisser les libéraux se peinturer dans un coin.»

À son avis, le gouvernement devrait tout d’abord interdire au premier ministre «d’utiliser l’argent des contribuables pour s’envoler à l’autre bout du Canada sous un prétexte comme le développement économique pour faire des dîners de financement politique à Calgary et Vancouver.»

Selon les données d’Élections NB, le Parti vert est celui qui a le moins à perdre en interdisant les contributions politiques des sociétés. En 2015, 90% des contributions reçues par les verts provenaient de particuliers.

À l’opposé, le Parti libéral est celui qui court le plus grand risque puisque 57,8% des dons au parti libéral en 2015 ont été effectué par des sociétés contre 41,6% par des individus. Les contributions des syndicats n’ont représenté que 0,6% des contributions cette année-là.

Chez les progressistes-conservateurs, 61,3% des contributions ont été faites des individus contre 38,6% par des entreprises.

L’Alberta, le Manitoba, le Québec, la Nouvelle-Écosse et le gouvernement fédéral ont déjà interdit les contributions politiques de la part des sociétés et des syndicats. L’Ontario et l’Île-du-Prince-Édouard ont promis de faire de même sous peu.