Le chien de garde des dépenses de la Législature a besoin de mordant
Je viens juste de passer trois semaines de suite à examiner le défilé des témoins des ministères et des sociétés publics à titre de membre du comité des comptes publics et des sociétés de la Couronne. Notre responsabilité est de nous assurer que ces organisations dépensent leur budget d’une manière efficiente et efficace. Les questions qui guident les travaux de nos comités doivent ressembler à « Est-ce que les ministères réalisent les objectifs des politiques et des programmes qu’ils doivent mettre en œuvre, et le font-ils économiquement ? » Lorsque la vérificatrice générale entreprend ses investigations, c’est notre responsabilité d’examiner ses conclusions, de poursuivre l’imputabilité et de s’assurer que ses recommandations sont pleinement suivies. Notre comité se rapporte à l’Assemblée législative avec des observations ou avec des recommandations que nous croyons pertinentes pour des actions à entreprendre.
Les audiences du comité des comptes publics ne sont pas censées être de mini périodes de questions où les membres de l’opposition tenteraient de compter des points politiques en questionnant les sous-ministres. Et ce n’est pas non plus le travail de ce comité de remettre en question les politiques actuelles que des ministères ou des sociétés de la Couronne ont demandé à l’administration de mettre en œuvre.
Notre responsabilité est plutôt de fournir une supervision financière et d’examiner la responsabilité publique. Les Néobrunswickois ont le droit de savoir comment leur argent est dépensé, et ont le droit de s’attendre à ce que notre comité aille remédier tous les problèmes que nous trouvons ou qui sont découverts par la vérificatrice générale. Par le passé, les travaux du comité étaient mutilés par la partisanerie et par les interférences de l’administration. Plus récemment, notre comité s’est efforcé d’améliorer son efficacité, ce qui, en quelque sorte, a pris au dépourvu certains sous-ministres et présidents directeurs généraux de corporations de la Couronne.
Quand Ambulance Nouveau-Brunswick s’est présentée devant le comité, il m’est apparu évident que nous avions la mauvaise personne dans la chaise du témoin. Le PDG d’Ambulance Nouveau-Brunswick m’a dit qu’il était en réalité un employé des services de santé Medavie de la Nouvelle-Écosse, mais pas de notre corporation de la Couronne. Son travail consistait à gérer Services médicaux d’urgence NB (SMU NB), une subsidiaire de Medavie qui dirige Ambulance Nouveau-Brunswick, une des onze autres compagnies subsidiaires en Nouvelle-Écosse, à l’IPÉ, en Ontario, en Saskatchewan, en Alberta et dans l’état du Massachusetts. Il est vrai que lui-même et son personnel gèrent les 100 millions de dollars que nous fournissons pour diriger Ambulance Nouveau-Brunswick et payer les frais de gestion des services de santé Medavie et leurs primes de rendement. Mais le contrat de 10 ans de Medavie arrive à sa fin et je voulais donc savoir quel processus serait enclenché pour déterminer si le contrat devait être renouvelé ou pas. Ce n’était pas une question à poser au gestionnaire privé d’une société publique Ambulance Nouveau-Brunswick. Ma question devra attendre la réponse du sous-ministre de la Santé.
Quand le sous-ministre de la Santé a comparu devant le comité, il a mentionné qu’il ne pouvait dire si des mesures avaient été prises pour évaluer la performance d’Ambulance Nouveau-Brunswick sous la gestion privée de Services de santé Medavie. Ce serait une affaire qui reviendrait au cabinet. Et comme nous le savons bien, le premier ministre et son cabinet ont décidé de privatiser la gestion de nos programmes extramuros et de la confier aussi au privé à Medavie, augmentant ainsi les couts de nos bienaimés services de soins de santé.
Et ce ne sont pas simplement des emplois de gestion qui ont été confiés à la sous-traitance, le ministère du Développement social et celui de l’Éducation ont conclu des contrats de plusieurs millions de dollars en 2013 avec une société internationale de conseillers, Ernst and Young, pour ses conseils sur comment réduire les budgets.
Les sous-ministres de la Santé et du Développement social avaient reçu des directives politiques de « très haut » dans l’administration conservatrice, leur ordonnant de faire des coupures importantes à leur budget, et ce aussi rapidement que possible. Une armée de conseillers d’Ernst and Young devait découvrir comment y arriver.
Cela a couté au ministère de l’Éducation plus de 6 millions de dollars et le ministère du Développement social a dû payer 13 millions de dollars. Les ententes avaient fixé des plafonds au total des indemnités journalières payées aux conseillers et pour leurs frais de voyage et de séjour, toutefois aucun plafond n’avait été fixé aux honoraires liés au rendement, qu’ils pourraient recevoir. Initialement, les conseillers devaient recevoir des honoraires liés au rendement calculés selon un pourcentage des économies budgétaires réalisées grâce aux réductions budgétaires recommandées. Quelqu’un, quelque part dans l’administration, a obtenu que les contrats soient modifiés pour que ces honoraires de performance soient calculés selon les économies prédites plutôt que sur les économies réellement réalisées.
Les sous-ministres de l’Éducation ont affirmé à notre comité que finalement, ils n’avaient jamais payé d’honoraires de performance. Toutefois, le ministère du Développement social a payé des millions de dollars. Pour notre comité, le problème était qu’il ne restait plus un seul fonctionnaire à l’emploi du ministère du Développement social qui avait été impliqué dans les négociations ou la mise en place de l’entente avec Ernst and Young — même pas un greffier qui aurait rédigé les comptes-rendus des rencontres. Avec personne à qui demander pourquoi le ministère avait payé des honoraires de performance selon les économies prédites plutôt que réalisées, il a été impossible d’éclaircir ce mystère.
Pour remplir nos responsabilités comme la population s’attend de nous, notre comité a besoin davantage de pouvoir de l’Assemblée législative, pour assigner des témoins à comparaitre, de les assermenter et les contraindre à divulguer des documents. Nous avons besoin d’une ou d’un recherchiste pour que les membres ne se voient pas obligés de dépendre du personnel politique pour effectuer des recherches et des analyses. Et finalement, le premier ministre doit dire à son personnel politique de cesser d’interférer avec le travail du comité des comptes publics. La population ne mérite rien de moins que cela.
David Coon est chef du Parti vert du Nouveau-Brunswick et député de Fredericton-Sud