Faut-il bannir les sacs de plastique jetables? – Acadie Nouvelle – 26 Janvier 2018
«Nous avons perdu le leadership provincial sur la gestion des déchets, ce n’est pas une priorité pour le ministère»-David Coon
l’article par: ACADIE NOUVELLE
Au Québec, les municipalités de Montréal, de Mascouche, de Boisbriand et de Brossard ont déjà interdit les sacs de plastique jetables. – Archives. Alors que de plus en plus de municipalités et de pays interdisent la distribution de sacs de plastique à usage unique, 10 000 tonnes de sacs se retrouvent chaque année dans les ordures au Nouveau-Brunswick.
Utilisés en quelques minutes, les sacs de plastique mettent plusieurs centaines d’années à se dégrader et sont ingérés par les animaux marins et les oiseaux. Leur légèreté facilite leur dispersion dans l’environnement, notamment vers les océans où se forment de véritables îles de plastique.
Face à ce fléau écologique, une douzaine de pays africains ont décrété le bannissement des sacs d’emplettes jetables, tout comme la France, l’Italie ou la Chine.Au Québec, les municipalités de Montréal, de Mascouche, de Boisbriand et de Brossard ont suivi le mouvement et c’est désormais la Nouvelle-Écosse qui étudie la possibilité de taxer ou d’interdire leur usage.
Au Nouveau-Brunswick, une partie des 10 000 tonnes de sacs de plastique jetés annuellement finissent à l’enfouissement. C’est l’option choisie par la Commission de services régionaux de la Péninsule acadienne (CSRPA) qui ne recycle pas les matériaux contenus dans ces sacs.
«On a demandé à la population de ne pas placer de matière recyclable dans des sacs. On aimerait que les gens ne les utilisent pas du tout. C’est un inconvénient pour nous, ça prend de la main-d’oeuvre pour les trier», explique Gary LeBlanc, directeur du service de gestion des déchets solides de la CSRPA.
Il n’existe toujours pas de solution rentable pour le recyclage de ces sacs. Le marché n’est pas là et ce type de plastique se négocie à un prix dérisoire, ajoute M. LeBlanc. Selon lui, la province devrait les bannir.
«Il y a des alternatives, il n’y a pas de raison que les citoyens n’aillent pas à l’épicerie avec leur propre sac. C’est un déchet de moins. S’il faut légiférer pour changer les choses, pourquoi pas.»
Contactée par l’Acadie Nouvelle, la directrice des communications du ministère de l’Environnement et des Gouvernements locaux n’a pas été en mesure de préciser si la province avait un plan pour limiter l’usage des sacs de plastique à usage unique. Elle rappelle que les programmes de recyclage sont avant tout gérés par les commissions de services régionaux.
De son côté, le chef du Parti vert estime que Fredericton a un rôle à jouer dans ce dossier. «Nous avons perdu le leadership provincial sur la gestion des déchets, ce n’est pas une priorité pour le ministère», déplore David Coon.
Il se dit favorable à la généralisation d’une tarification de cinq cents le sac.«Le bannissement serait une bonne solution à long terme», précise-t-il.M. Coon y voit une opportunité économique, il suggère que la province devrait encourager des solutions de remplacement, notamment la production locale de sac de papier recyclable ou de bioplastiques qui se décomposent plus facilement.
L’été dernier, la Chine, premier acheteur de matières recyclables au monde, a annoncé qu’elle n’accepterait plus l’importation de déchets de plastique. Depuis, la valeur des sacs de plastique s’est effondrée et les sites de recyclages peinent à trouver de nouveaux acheteurs.
Jusqu’à présent, Eco360, l’organisme responsable du recyclage dans le Sud-Est et dans Kent, expédiait les sacs de plastique en Chine où ils étaient fondus puis assemblés sous forme de flocon et de billes.Désormais les sacs sont stockés à Moncton et s’accumulent jusqu’à ce qu’un nouveau marché ait été trouvé.
«La situation n’est pas aussi critique qu’à Halifax où ils doivent tout enfouir», assure Gena Alderson, coordonnatrice du détournement des déchets chez Eco 360.
«Nous avons essayé dans le passé d’envoyer le plastique à des entreprises locales, mais ça leur causait des problèmes car la matière était trop sale, contaminée et difficile à recycler.»Si l’interdiction des sacs de plastique n’est pas encore à l’ordre du jour, l’idée devient de plus en plus séduisante.
«Je pense que c’est quelque chose qu’il faudra considérer si on ne réussit plus à trouver de marché pour ces matériaux. Je pense que les gens auront du mal au début, mais ils finiront par s’adapter et à amener des sacs réutilisables», note Gena Alderson.
«Les sacs de plastique sont difficiles à gérer et à entreposer. Ils se collent à d’autres matériaux et ça nous complique les choses parce qu’il faut les retirer à la main. S’il y a en avait moins, ce serait mieux pour nous.»
Un entrepreneur de Shippagan veut donner une nouvelle vie aux sacs de plastiqueThermopak, une entreprise de Shippagan, a pour projet de transformer les sacs de plastique en produits à plus haute valeur ajoutée.
En collaboration avec le chercheur Jean-Rémi Lanteigne, la société dirigée par Bernard Morin a développé de nouveaux procédés et trouvé de nouvelles applications aux déchets en plastique.
«Les sacs contiennent beaucoup de contaminants organiques, comme de l’encre. Ce n’est pas rentable d’en refaire des sacs de mauvaise qualité. Nous, on va les nettoyer puis modifier la structure moléculaire du plastique pour en faire des éléments plus solides comme des matériaux de construction qui pourraient durer 10 à 15 ans, puis être recyclés à nouveau», décrit M. Morin.
S’il parvient à réunir le financement nécessaire, l’entrepreneur espère pouvoir ouvrir, dès cet été, une usine pilote capable de recycler quelque 2000 tonnes de plastique par année.Si le concept fait ses preuves, la capacité de production pourrait être augmentée à 10 000 tonnes par an et l’usine pourrait alors récupérer tous les sacs de plastique du Nouveau-Brunswick.
«On a monté un plan d’affaires et on est en discussion avec la province et des partenaires privés. On a besoin d’investissements de quatre millions.»Le rêve de Bernard Morin: exporter ce modèle dans d’autres provinces et ce, afin qu’aucun sac ne finisse dans un site d’enfouissement.